La boulette financière de je sais pas qui

A Pereire, il n'y avait pas une commande même de 50 francs qui sortait sans que le patron le sache. Fournitures, médicaments, nourritures, il était au courant de tout. On faisait même la cuisine qu'il voulait par catégories de malades.

Je ne sais pas s'il sait comment on passe une écriture fournisseur mais il connaît très bien le principe de la comptabilité. Je ne sais pas où il a appris tout ça. 

Quand on est hospitalisé, la clinique émet deux factures à la sécurité sociale (plus deux à la mutuelle et deux aux patients sur une seule) : une facture d'hôtellerie hospitalière et une facture d'honoraires des médecins.

Soit FC, la facture clinique et FH la facture honoraires.

Tout se fait par télétransmission avec envoi du papier pour confirmation.

Une fois les informations traitées, la sécu règle les deux factures par deux virements sur deux comptes bancaires différents.

Soit BC, la banque clinique et BH la banque honoraires

La clinique reverse les honoraires aux médecins après retenue de leur participation aux frais de fonctionnement. La redevance des médecins varie selon la spécialité et l'accord personnel de chaque médecin avec la clinique.

Soit R, la redevance des médecins et H, les honoraires

R = x% * H

En 1996, le contrôle de gestion était peu développé dans les PME et les progiciels arrivaient en masse. Avec les progiciels, les deux bases Compta générale et Compta auxiliaire restent séparées mais le lien se fait par des écritures automatiques plus ou moins détaillées pour donner à la compta générale plus d'informations. 
La connaissance des progiciels était certainement plus développée chez les prestataires des grandes industries mais dans les PME, les experts-comptables découvraient que cet outil inconnu (ils ne travaillaient pas dessus) a une architecture (l'imbrication des logiciels qui font l'outil final) qui rend le contrôle de gestion indispensable.

Chaque caisse départementale interprète comme elle veut le code de la facturation de la sécu, un énorme bouquin de quelques milliers de pages. Et les cliniques aussi. Et même s'il y a quelques points de désaccord, globalement ça va. Et les caisses s'en fichent, cela ne change rien dans les montants, elles versent sur les comptes qu'elles estiment appropriés.

Marghnia épluchait tous les mois chaque règlement pour trouver le montant des prestations clinique payées sur BH et le montant des honoraires payés sur BC. Elle faisait des virements entre les deux comptes et tout était niquel. Elle faisait aussi les rapprochements bancaires tous les mois, c'est-à-dire qu'elle comparait les relevés de banques avec les comptes banques (512) dans les deux comptabilités de la clinique. Et tout était niquel aussi. Forcément.

Je ne sais plus du tout expliquer comment 700 000 francs (plus de 100 000 euros) de la clinique ont pu dormir sur BH sans qu'il n'y ait aucune anomalie nulle part. J'ai du faire un rapprochement entre la banque et les comptes de la classe 7, comme on fait le contrôle de TVA entre les comptes 411.445 et 7. Mais cela n'explique pas comment cela a pu se produire. Le cabinet Giordano a du se poser des tas de questions...

Depuis 12 ans, beaucoup d'emplois ont été crées dans le contrôle de gestion et les experts financiers se sont mis sur la comptabilité auxiliaire. Depuis l'an 2000, j'ai vu dans mes missions d'intérim que des contrôles de schémas identiques à ceux que j'ai mis en place à la clinique en 1996 se sont généralisés dans tous les secteurs. D'autres ont trouvé les mêmes schémas mais leur existence prouve que ce que j'ai fait à la clinique était fiable.

Texte écrit en 2006

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