Le programme

Je sais que des enseignants se sentent très concernés par le programme parce que les choses ont beaucoup changé entre ma génération et celle de ma fille. Cela n’a pas du être facile pour eux de se battre contre l’absurdité. Et ils y sont arrivés. C’est top gun. Mais il reste encore beaucoup à faire.

Je n’ai jamais douté du niveau des enseignants. J’ai une licence, je me doute bien qu’un prof qui a ne serait-ce que le CAPES est incollable dan son domaine. Ce n’est pas la peine de nous en mettre plein la vue avec des programmes et des livres aussi invraisemblables. Tous les enfants ne sont appelés à devenir linguistes ou chercheurs en mathématiques.

Le seul problème de l’éducation nationale est le délire narcissique des professeurs responsables du programme, qui l’utilisent comme le miroir de la sorcière des contes de fées : Programme, joli programme, dis-moi qui est le plus intelligent ?

Alors qu’on a tous passé des examens, ne serait-ce que le permis de conduire, même les gens bardés de diplômes ont peur de ne pas pouvoir se reformer à un métier légèrement différent. Il y en a même qui descendent dans la rue pour manifester ! Et ça, c’est pas normal.

Les agrégés peuvent faire le programme de la fac qui s’adresse à des adultes ayant choisi leur spécialité mais je trouve que même s’il y a des exceptions, en général, les grosses têtes ont du mal à s’adresser aux novices parce qu’ils oublient que leur public manque de beaucoup d’éléments pour les comprendre.

Si on considère que des bacheliers ou des licenciés fraîchement diplômés ne sont pas capables de faire le programme des collèges, on dit que le bac et la licence ne valent rien. Personne ne parle de mettre tous les diplômes au même niveau. Mais si on monte le bas, le haut montera automatiquement. Si le bac + 3 est égal à zéro, le bac + 5 est égal à deux. C’est pas terrible. Mais si on reconnait la valeur du bac + 3, cela valorisera le bac + 4 ou + 5. Alors pourquoi autant de résistance ?

Le contre-pouvoir pourrait venir de la responsabilisation des lycéens et des étudiants que j’ai vus je ne sais plus en quelle année suivre un mouvement de grève juste parce qu’ils ont entendu leurs profs dire que le ministre voulait leur enlever je ne sais pas quoi. Et si c’est le prof qui le dit, on le croit et on le suit comme des moutons, en jetant la pierre au pauvre ministre qui n’a jamais eu pour objectif de faire du mal aux élèves, bien au contraire.

Ils veulent baisser le niveau ! Si l’objectif du ministre est de baisser le niveau effectif de la population, ce serait effectivement la cata. Mais le niveau effectif n’a rien à voir avec le programme. 

Ma fille qui n’a pas encore 13 ans, apprend en je ne sais pas en quelle matière la définition du PIB ! Je ne sais pas concrètement ce qu’est le produit intérieur brut et surtout je ne vois pas à quoi ça sert d’apprendre ça à son âge, lorsqu’on ne sait même pas ce qu’est une entreprise. Ce n’est pas à la limite du ridicule, on nage en plein dedans…mais oups, j’ai perdu l’occasion de me taire…

Je me suis intéressée pour la première fois à la notion de PIB en cours de Civilisation américaine à la fac. C’est en faisant la crise de 29 en anglais que j’ai compris et aimé l’étalon or, l’étalon dollar, le SME (serpent monétaire européen) et le rôle des banques dans l’économie. Je ne sais plus du tout l’expliquer aujourd’hui mais c’est à la fois complexe et pas du tout impossible à comprendre. A l’époque, j’étais incollable. Les cours de Civilisation américaine m’avait ouvert l’esprit sur l’économie dont je n’avais jamais aimé les cours au lycée parce qu’on se contentait d’apprendre des définitions sans relier aucune notion à un contexte concret. L’économie était tellement déconnectée de la réalité que je me demandais de quoi ça parlait.

Le marché est saturé. Cela veut dire quoi ? De quoi est-ce qu’on nous parle ?

Ils veulent supprimer des emplois ! 

En général, cela veut dire que l’éducation nationale a décidé de ne pas embaucher autant que l’année précédente. C’est vrai qu’il n’y a pas assez de profs mais je ne crois pas qu’un ministre puisse vouloir supprimer des emplois pour supprimer des emplois sinon le monde serait encore plus fou qu’il en a l’air. Ce que l’on ne nous dit jamais, c’est le pourquoi du comment. On nous en dit tellement peu que je me demande si la grève et les manifestations étudiantes ne sont pas un besoin mais un rituel social destiné à tromper l’ennui ambiant comme les grèves annuelles SNCF et RATP.

Si le ministre de l’éducation nationale fait son show médiatique, c’est la bérézina. Tout le monde prend l’éducation par-dessus la jambe et les étudiants prennent leur pouvoir de régulation politique pour un divertissement pour changer un peu des cours. Il n’y a plus rien à dire. On ne se bat plus pour rien et les hommes politiques ont complètement raison de nous prendre pour des débiles mentaux à qui il faut donner du pain et des jeux…On dirait qu’entre mai 68 et octobre 2008, on est passé de la démocratie athénienne à l’empire romain. Allez me faire croire après ça que le niveau a progressé…

Un autre contre-pouvoir ne pourrait venir que de la collaboration des ministres. Pour le moment, ce n’est pas le cas. Le ministre de l’éducation nationale semble travailler seul, ne peut rien faire et les autres qui ont pourtant aussi des enfants et des petits enfants le laissent dans sa merde sous prétexte que ce n’est pas leur job.

Il faudrait mettre l’éducation nationale sous le pouvoir d’une autre institution complètement indépendante des enseignants et composée de non-enseignants. Je n’ai pas besoin d’être agrégée en Mathématiques pour savoir que le programme est absurde et inutile. Si les profs ne se contentent pas d’enseigner au lieu de prendre la barre de navigation de l’institution, nos enfants continueront pas se casser les pieds à apprendre des définitions qu’ils s’empresseront d’oublier parce que ce qu’on leur apprend ne correspond à rien dans leur esprit.

En seconde générale à St-Germain, les élèves dissèquent des grenouilles, chacun sa propre grenouille comme s'ils étaient tous destinés à devenir chirurgiens ou vétérinaires. 

Les agrégés peuvent écrire des livres qui s’adressent à des adultes ayant choisi leur spécialité. Mais le programme des collèges devrait être confiés aux licenciés. Jusqu’à la troisième, cela suffit très largement. Et le fait de baisser le niveau du programme fera monter le niveau effectif de la population parce que l’école nous aura donné le goût de continuer à faire des découvertes.

Je ne comprends pas que le ministre de l'éducation nationale n'ait pas le pouvoir de mettre des limites aux profs. Tous ceux qui ont essayé ont sauté. Le poste de ministre est un piège éjectable. Pour faire tout son mandat, il ne faut rien faire. Sourire 

Il faudrait que quelqu'un aille y faire un tour. :-)

Info importante : tous ces textes ont été écrits en 2011. Je ne sais plus du tout ce qui se passe à l'éducation nationale aujourd'hui, Océ est grande et travaille depuis plusieurs années. Les choses ont du changer depuis, les choses changent très vite et pas forcément en bien...

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